Rien

Frost

Autrefois il y avait des truites de torrent dans les montagnes. On pouvait les voir immobiles dressées dans le courant couleur d’ambre où les bordures blanches de leurs nageoires ondulaient doucement au fil de l’eau. Elles avaient un parfum de mousse quand on les prenait dans la main. Lisses et musclées et élastiques. Sur leur dos il y avait des dessins en pointillé qui étaient des cartes du monde en son devenir. Des cartes et des labyrinthes. D’une chose qu’on ne pourrait pas refaire. Ni réparer. Dans les vals profonds qu’elles habitaient toutes les choses étaient plus anciennes que l’homme et leur murmure était de mystère. 

La route, Cormac McCarthy, 

traduction de l’américain par François Hirsch

D’une part, on a le récit. Un conte qui se déroule comme un voyage au cœur d’un temps post-cataclysmique, inspiré notamment par La route, roman culte de l’écrivain américain Cormac Mc Carthy. La terre y est encombrée de cendres, stérile. La vie gelée.

Et par ailleurs – autre espace, autre temps – deux femmes, confinée chacune dans une capsule de taille humaine. Venues vivre en terre sauvage une expérience de silence et de solitude, elles rencontreront l’extrême. Au cœur d’elles-mêmes et au gré des bouleversements, elles écrivent. Ça s’écrit même sous nos yeux. Et c’est là où Frost flirte avec la performance, puisque cette création fera intervenir deux auteures – Julie Gilbert et Antoinette Rychner – sur le plateau pour écrire des textes en direct, inédits, soir après soir. 

Entre ces deux figures et un héros affrontant un environnement hostile va se jouer le pari d’un avenir, une issue à la fois tragique et porteuse d’espérance.

 

mise en scène: Ludovic Chazaud

co-écriture en live: Julie Gilbert et Antoinette Rychner

scénographie, éclairage et vidéo: Stéphane Gattoni,

jeu:Cédric Simon

participation au développement de la co-écriture en live: Thomas Flahaut

co-production:

Cie Antoinette Rychner

Centre de culture ABC, La Chaux-de-Fonds

CCN, Neuchâtel

2.21, Lausanne

crédit photo: Guillaume Perret

  • Octobre 2014/centre culturel de l’ABC, La Chaux-de-fonds, CCN-Théâtre du Pommier, Neuchâtel, 9 -14 décembre/Théâtre 2.21, Lausanne.

Couvre feux

Le retour d’un homme dans sa campagne d’origine. 
Pour l’enterrement de sa grand-mère. 
Il vient avec sa fille qu’il ne reverra plus après ça.
Dans ce retour aux terres originelles, se mêlent les désirs du temps présent,  les frayeurs du passé. 
C’est un voyage dans les temps que nous propose Didier-Georges Gabily, dans une langue formidablement belle.
Une histoire d’amour et de désirs fabuleux d’un père pour sa grand-mère, et pour sa fille.
Un trouble entre réalité et mythe.
Une fuite en avant vers le passé.

Gabily avec Couvre-feux nous plonge dans la tête d’un homme qui se parle d’un événement marquant de son histoire. 
Une immersion poético-fantastique dans les brouillons de pensées d’un être en quête de son passé pour éclairer une enfant. 
Cet homme est déchiré entre tout, déchiré d’avoir perdu tout.
Cette enfant j’aime l’imaginer, rattrapant son père à chaque instant où il fuit en pensée, le touchant, profitant de l’instant précieux et rare avec son père. Son père à l’instant absent.

Sommes-nous absents au présent? 

 

mise en scène: Ludovic Chazaud

collaboration artistique: Camille Mermet

avec: Baptiste Gilliéron, Aline Papin

une enfant en alternance: Mathide Liengme & Hannah Jones

aïeule: Rosengela Gramoni

images: Carmen Jaquier

scénographie: Elissa Bier

son : Cédric Simon

lumière : Guillaume Gex

régie générale & plateau: Jean-Baptiste Roybon

construction: Atelier TPR, JB. Royobon

administration: Maria Da Silva

production : Cie Jeanne Fôhn/ Fondation Arc en Scènes/ Théâtre du Loup / Grange de Dorigny

soutien : Ville de Lausanne / Canton de Vaud / Ernst Göhner Stiftung/ Pourcent Culturel Migros / Fondation Suisse des Artistes interprètes (SIS)

crédit photo: Elissa Bier

 

  • 26 novembre 2013 TPR/La Chaux de fonds, 7-8 février 2014 Théâtre du Loup/Genève, 13-16 mars 2014 La Grange de Dorigny/Lausanne

SARA-Mon histoire vraie (1)

J’ai demandé à Sara de me raconter une histoire en détail. Je ne sais pas pourquoi. Je lui ai dit une histoire fondatrice pour toi, selon toi. Avec tes mots, les tiens. Une histoire qui raconterait ce que tu es devenue maintenant, depuis que l’on s’est perdus. À ce moment là, cette histoire m’a attrapé.

SARA raconte un début ou une enfance. Des retrouvailles d’amitiés. Là où règne encore un certain amusement aveugle, gouverné par les rires tragiques. C’est l’histoire de Sara, la copine d’enfance. L’insouciance, les amis, les amours adolescentes, une histoire où l’on est bourreaux et victimes, où plus tard on a fait le choix de cruauté et de légèreté.

Ludovic Chazaud signe un va-et-vient palpitant entre son histoire avec Sara et son imaginaire. On plonge alors dans un trépidant récit à trois voix, qui nous emmène tour à tour dans l’enfance, dans l’intime, puis le présent, l’âge où l’on devient parent.

Sara est une amie d’enfance.
Une amie dont j’étais amoureux. Je l’ai retrouvé à l’âge de 31 ans.
Nous avons commencé à nous raconter des choses.
À l’adolescence, Sara avait dans sa classe une camarade rejetée.
Une fille devenue la risée de la classe.
Sara se moquait aussi.
Sara et ses camarades lui ont fait croire que l’un des garçons de la classe était amoureux d’elle. Ce garçon était le petit ami de Sara.
La fable de Sara nous raconte l’escalade du mensonge, de l’aveuglement, d’une violence. Escalade qui pourra conduire au drame.

La compagnie Jeanne Föhn réalise ici un spectacle comme une réflexion sur le réel du plateau. Il s’agit d’une histoire entre documentaire et fiction, entre biographie et théâtre qui s’appuie sur des photos, des entretiens mais surtout sur le récit d’évènements vécus et d’autre fantasmés. Il s’agit d’une réflexion portée au plateau sur la manière de récolter des souvenirs, de s’en servir. Une réflexion sur la façon subjective que l’on a de regarder un événement, de se l’approprier ou de s’en éloigner. La fable de Sara commence avec ce mensonge d’ado, il fait s’emblant d’aimer, il s’ensuit un labyrinthe de regards sur le monde où plus personne ne peut savoir ce qui est vrais.

Le spectacle est relecture des réalités avec violence, tendresse et humour. Une relecture où l’imagination gouverne le réel mais où le réel est roi. Affirmer et jouer de la présence. Reproduire. Redire. Refaire. Rejouer.
Lorsqu’un être est sur scène, dans la rencontre avec le public, il n’y a rien de plus réel. C’est une rencontre, un rendez-vous en chair et en os, un échange. Cependant la scène se drape dans un manteau de fiction pour s’emparer de la cruauté. C’est de ce frottement qu’est né une partie du théâtre documentaire : pourquoi plonger dans la fiction quand la cruauté nous entoure ? Quand le monde témoigne de drames aussi forts que les drames du théâtre?

Les « témoins du réel » ont donc fait leurs apparitions sur les plateaux, ils ont retransmis leurs drames. C’est une belle démarche qui a sa justesse dans notre monde où les tragédies ont tendance à nous toucher que si elles sont proches. S’impliquer comme passeur de l’histoire devient une mission du théâtre. Devenir celui qui a connu, qui a rencontré et su. Aller à l’encontre du privilège de l’authenticité et de la sincérité, deux termes qui deviennent pour nous des outils déclencheurs de fable, de drame. Deux termes qui servent de clefs pour déverrouiller chez le spectateur la perception de la fiction et retourner sur le seuil de la présence réelle. Car il nous reste encore à affirmer le plateau comme l’endroit du jeu, de la fiction, l’endroit où le drame se joue en présence, et cette présence affirme déjà le réel.

La galerie des effets de réel

Le public pourra découvrir une installation, sorte de galerie de pièces à conviction – préambule au spectacle – dans les Foyer des théâtres. Ou dans de petits livrets distribué à l’entré des salles.

J’avais envie créer un processus de remémoration pour le public comme pour les acteurs de la création.

Lors de l’écriture de ce texte, je me suis rendu compte à quel point je mettais ma mémoire en marche pour retrouver les instants partagés avec Sara. Cette mémoire me donnait à voir des détails à la fois cruciaux, faisant avancer la narration, ainsi que des points complétement anodins comme le « Monster Munch » qui trainait sous la table au moment où Sara me racontait son souvenir avec Magalie. J’ai trouvé aussi important, amusant, de rendre au texte ces zooms que fait la mémoire entre détails et faits cruciaux.

Plus tard, j’ai lu le texte de Roland Barthe sur les effets de réel. Je retrouvais, dans ce principe d’auteur de fiction, quelque chose qui se passait dans mon texte avec ces zooms.  Alors, lorsque que j’ai dû conduire le texte dans des moments où régnait davantage la fiction, j’ai poursuivi ce travail de zooms en les construisant avec mon imaginaire. Tentant de recréer pour l’auditeur ce phénomène qui se produisait pour moi au moment de mes remémorations d’écriture.

Par la suite, il m’a plu de tenter le pari en investissant tout un espace que propose le théâtre pour le transformer en machine de remémoration. Proposant aux spectateurs, dans un premier temps, une immersion complète dans les effets de réel que nous allons raconter sur le plateau, leur donnant à chacun la possibilité de construire la même mémoire visuelle que celle qui m’a servi à produire le texte, je tente le coup de construire une mémoire collective immédiate. Le théâtre est un lieu de l’imaginaire solitaire et collectif où nous embarquons un public pour un voyage aux mêmes sensations où chaque individu est armé de ses images personnelles qui combleront les lacunes des mots.

Nous souhaitions créer ce prélude à l’histoire ; une galerie des effets de réels.

Il s’agissait de proposer un cocon de mémoire, comme si le public était invité à rentrer puis sortir du spectacle en passant par le tunnel de ma mémoire. Proposant au public des certitudes, lui offrant des images du « ça s’est vraiment passé comme ça », essayant ainsi toujours de rapprocher l’histoire plus près des yeux pour que le public se la colle plus près du cœur.

 

texte et mise en scène: Ludovic Chazaud

collaboration artistique: Aline Papin

avec: Céline Nidegger, Mathias Glayre, Ludovic Chazaud

création son et musiques: Alexis Gfeller – Cédric Simon

création lumières: Joana Oliveira

création costumes: Olga Kondrachina

scénographie et construction: L’illustre atelier – Serge Perret

administration: Maria Da Silva

coproduction : Petithéâtre de Sion | Théâtre La Grange de Dorigny-UNIL

soutien : Ville de Lausanne | Canton de Vaud | Pourcent culturel Migros | Loterie Romande

crédit photo: Dorothée Thébert

 

 

  • Février 2018 La Grange de Dorigny/Lausanne

Une histoire ou Christian Crain

Sous nos yeux un homme erre dans sa chambre parisienne.
Nous portons toute notre attention à ses faits et gestes, nous voulons qu’il fasse quelque chose, autre chose.
Il ne fait rien.
Tout le drame est là, devant nous, il déambule chez lui en témoin de chez nous, un drame de rien du tout, un être insignifiant.
Il est complexe de voir en lui le héros de notre histoire. Peut-il nous représenter en étant rien, rien d’autre?
Alors, nous créons pour lui, nous lui donnons des outils. Nous mettons à sa disposition des accessoires, de la musique, d’autres individus pour interférer sur son histoire, le confronter à des choix. Mais il reste opaque à toute signification, il se dégage constamment du sens qu’on lui propose pour le sauver, ici et maintenant.
Il est Christian Crain dans une histoire, cette histoire c’est la nôtre, Christian Crain c’est nous autres.

Le metteur en scène joue avec ce qui nous épouvante le plus intimement: le fait d’exister sans nécessité, sans but, le fait d’agir sans une réponse qui nous garantit que cela est indispensable et essentiel. Basé sur les travaux de Clément Rosset, ce spectacle nous interroge sur le réel, son essence idiote (au sens d’une chose qui n’existe qu’en elle-même) et sur le processus d’attribution d’une signification à cette réalité, en lui prêtant une valeur imaginaire, en lui donnant du sens.

Le metteur en scène s’amuse alors avec un personnage qui refuse d’être son « insignifiant » qui réfute même le fait d’être un personnage. Une espèce de super- héros de la réalité aux prises avec la théâtralité.
Comment croire au théâtre?

Qui gagnera, réalité ou fiction?

 

mise en scène: Ludovic Chazaud

collaboration artistique: Camille Mermet

avec : Béranger Crain, Aline Papin, Cédric Simon

écriture: Antoinette Rychner & Jeanne Föhn

lumière: Guillaume Gex

décors: Jeanne Föhn

crédit photo: Ludovic Chazaud

  • mars 2013 Théâtre les Halles/Sierre

Imaginer les lézard heureux

Imaginer les lézards heureux est une création insouciante et délirante sur les thèmes de l’angoisse et de la liberté. Des êtres livrés à eux-mêmes sont sur une île déserte et inhospitalière où rôdent des lézards géants. Ces naufragés sont condamnés à vivre leur dernière journée. Chacun revisite son passé et raconte un moment fondateur de sa vie. Ces confessions révèlent leurs fantasmagories mais aussi leur mal-être. Englués jusqu’à alors dans une forme de déterminisme, ils découvrent une nouvelle forme de liberté – cet ultime jour n’est-il pas à l’image d’un millième d’instant où tout pourrait basculer ? Ils réalisent que leur existence pourrait changer s’ils faisaient des choix. Cette nouvelle vision, loin de les rassurer, les confronte au désespoir, car c’est bien dans cet état de conscience que se déchaîne la folie des possibles. Face à cette absurde situation de « condamnés à la liberté », une seule question mérite d’être entendue : comment agir?

texte: d’après l’œuvre de Stig Dagerman

réécriture: Ludovic Chazaud et Antoinette Rychner

mise en scène: Ludovic Chazaud

collaboration artistique: Emilie Launay-Bobillot

 

scénographie: Serge Perret / Les ateliers du colonel

création son: Alexis Gfeller, Cédric Simon

création lumière: Yan Godat, Joana Oliveira

costumes: Trina Lobo, Marion Schmid

régie générale: Jean-Baptiste Roybon

régie son: Roméo Bonvin

administration: Maria Da Silva

avec: Emilie Launay-Bobillot, Cédric Djedje, Baptiste Gilliéron, Aurore Jecker, Aline Papin, Cédric Simon

Soutien: Canton de Vaud, Ville de Lausanne, Pourcent Culturel Migros_VD, SSA, SIS, Nestlé pour l’art, Ernst Goehner Stiftung

crédit photo: Francesca Palazzi

  • 16-20 février 2016 La Grange de Dorigny/Lausanne, 25 février-6 mars 2016 Théâre du Grütli/Genève

L’Étang

Oeuvre de jeunesse de Rober Walser, écrite vers 1902, L’Étang met en scène le suicide simulé par le jeune Fritz (double criant de Walser) pour gagner l’amour de sa mère dont il se croit mal aimé. Dans les sillons de cette pièce, Ludovic Chazaud égrène des écrits du poète et des conteurs, Rainer Maria Rilke et les frères Grimm, ainsi que les personnages d’autres fables, comme Blanche-Neige et Cendrillon qui, pour exister dans les adaptations futures de Walser, guideront Frits vers le chemin de l’écriture. Ce récit d’initiation, dont le spectacle fut ébauché à La Manufacture avec des comédiens de l’école, nous immerge dans la forêt du doute amoureux, le sentier de la solitude, les danses des amours impossibles…

 

mise en scène: Ludovic Chazaud

collaboration artistique: Camille Mermet

avec: Emilie Bobillot, Baptiste Gilliéron, Stella Giuliani, Aurore Jecker, Aline Papin, Cédric Simon

son: Cédric Simon

lumière: Nicolas Berseth, Ludovic Chazaud

crédit photo: Mercedes Riedy

  • 9 – 18 avril 2011 Arsenic/Lausanne